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Pierre Monette 18 juillet 2001 :

L’"affaire Guibord" est une des pages noires de notre histoire.

En novembre 1869 meurt Joseph Guibord, un simple imprimeur, un petit notable comme tant d’autres, qui a cependant commis un grave péché: il était membre de l’Institut canadien. Cette association culturelle possédait une bibliothèque dans laquelle on trouvait des oeuvres à l’index, c’est-à-dire des livres interdits par le clergé: des ouvrages scientifiques, des recueils de poèmes, des romans pas assez moraux aux yeux des ultramontains, les intégristes catholiques de l’époque.

Et voilà que Mgr Bourget interdit d’enterrer le pauvre Guibord dans le cimetière catholique de Montréal. S’ensuit un procès retentissant opposant ultra-cathos et libéraux: ceux qui ne tenaient pas à ce que le Québec d’alors se soumette totalement aux soutanes! L’"affaire Guibord" durera finalement quatre ans. On parviendra malgré tout à inhumer Guibord au cimetière de la Côte-des-Neiges. Il faudra cependant le faire sous la protection de l’armée! Et on devra recouvrir son cercueil d’une dalle de ciment afin d’éviter toute tentative de profanation du cadavre.

Dans Joseph Guibord, victime expiatoire de l’évêque Bourget, Adrien Thério reconstitue toutes les étapes de cette "affaire Guibord". À grand renfort de documents d’époque, le livre propose un portrait saisissant de l’incroyable étroitesse d’esprit du clergé canadien-français. Et l’ouvrage rend d’autant plus attachants les quelques hommes comme Joseph Doutre et Louis-Antoine Dessaules qui, en se portant à la défense du pauvre Guibord et de sa veuve, se sont faits les champions de la tolérance et de la liberté.

Avec ce livre, Adrien Thério signe une fascinante enquête historique.